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C’est donc un nid que le château de la Roche, un vrai nid de troglodytes, d’autant plus que tout le flanc du rocher dont nous occupons le plus large enfoncement est grossièrement creusé de grottes et de chambres irrégulières que la tradition attribue aux anciens hommes sauvages (c’est le mot très-juste dont se servent nos paysans), et que les antiquaires n’hésitent pas à classer parmi ces demeures des peuples primitifs que l’on rencontre à chaque pas sur certaines parties du sol de la France.

Bien que notre domaine fût situé dans le département de la Haute-Loire, et que l’on s’habitue déjà en France à regarder les limites des départements comme celles des anciennes provinces, ma famille se défendait énergiquement de n’être pas de la noblesse d’Auvergne, et elle avait raison, puisque l’Auvergne avait autrefois pour limite la montagne de Bar et s’étendait, par conséquent, bien au delà de Brioude.

Il faut connaître les rivalités tenaces qui ont existé durant des siècles entre les pays limitrophes, et qui se font encore sentir avec âpreté, pour comprendre à quel point mes vieux oncles et mes vieilles tantes tenaient à être de souche auvergnate et à n’avoir rien de commun dans leurs origines avec le Velay.

Le château de mes pères est planté haut dans la roche, puisque ses clochetons élancés en dépassent la