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réflexions de Love sur le veuvage du cœur. Nous étions auprès d’une scierie de planches, au penchant d’une verte montagne boisée. Ces usines rustiques sont très-pittoresques dans les monts Dore. Celle-ci était dans un site d’une rare poésie, et la famille y faisait halte pour prendre sur l’herbe sa collation portative de chaque jour. Nous étions chargés de trouver à cet effet de l’eau de source et une belle vue, ce qui n’était pas difficile, et nous servions nos voyageurs avec zèle ; mais, aussitôt que tout était à leur portée, ils nous faisaient asseoir tous trois assez près d’eux, et Love nous passait avec beaucoup de soin et de propreté la desserte, qui était copieuse.

Au moment où Love et son père s’entretenaient comme je viens de le rapporter, François lui improvisait un siège et une table avec des bouts de planche. Je feignis de trouver qu’il ne s’y prenait pas bien, et je m’approchai d’elle pour voir l’expression de son visage ; mais elle se détourna vivement, et il sembla que, comme au château de Murol, elle faisait un grand effort sur elle-même pour retenir une larme furtive. Quelques instants après, elle me regarda en prenant de mes mains la petite corbeille qui lui servait d’assiette pour déjeuner, et elle dit à son père en anglais :

— Alors ce serait là un frère de Jean.