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jean ziska.

n’était qu’une hypocrite défection, chez un parti qui se portait aux mêmes excès quand il croyait à l’impunité. Les sectes ardentes s’étant rencontrées sous les murs d’une ville catholique avec des assiégeants calixtins, ceux-ci affectèrent de communier en grand appareil, et leurs prêtres portèrent l’Eucharistie, revêtus de riches ornements. C’était scandaliser ces austères réformateurs, qui voulaient effacer toute trace des pompes de l’ancien culte et abolir toute suprématie temporelle du clergé. Ils se jetèrent sur les prêtres calixtins : À quoi servent, leur dirent-ils, ces habits de comédiens ? Quittez-les, et communiez avec nous sans ces oripeaux, ou nous vous les arracherons. Quelques chefs des deux partis apaisèrent cette querelle ; mais Nicolas de Hussinetz marcha sur Prague, et enjoignit, avec menaces, à la communauté calixtine de préposer autant de Taborites que de Praguois à la garde des tours et aux délibérations des conseils. Ceux de Prague répondirent naïvement que, l’ennemi étant loin, ils n’avaient que faire d’être si bien gardés et si bien conseillés. On se querella particulièrement sur les opinions religieuses, et c’est alors qu’on s’aperçut d’une dissidence d’opinion alarmante pour les modérés. L’aigreur en arriva au point qu’il fallut entrer en délibération sérieuse pour un accommodement. On convoqua les représentants de tous les partis dans l’église de Saint-Ambroise. Ceux des deux villes de Prague eurent pour chacun leur place à part, et les Taborites également ; seulement on défendit qu’il y eût là ni femmes ni prêtres. Les Taborites avaient de grandes idées d’émancipation pour leurs femmes, les admettant à une égalité de condition et de discussion, qu’elles justifiaient bien par leur conduite héroïque jusque sur les champs de bataille. En outre, ils avaient pour leurs prêtres une vénération extrême : les ayant dépouillés de tout caractère temporel,