Page:Sand - Jean Ziska, 1867.djvu/91

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
86
jean ziska.

bien poltrons, mais pas à ce point ! » Aussitôt les cavaliers descendant de cheval : « Vous allez voir, dirent-ils, que nous irons où vous n’irez pas. » Ils se jetèrent au-devant de ces fléaux de fer que l’empereur avait si fort méprisés, et il n’en revint pas un seul. Les Hongrois, voulant les venger, eurent à dos ceux des villes sacrées et prirent la fuite. L’empereur piqua des deux et s’échappa à grand’peine. Les Praguois les poursuivirent et ne firent quartier à aucun de ceux qu’ils purent joindre. La plus grande partie de la noblesse de Moravie y demeura. Plus de trois cents grands seigneurs bohèmes du parti de l’empereur restèrent là quatre jours sans sépulture, abandonnés aux chiens. L’infection fut horrible. Un chef hussite, touché de compassion du sort de tant de braves gens, les fit enterrer à ses frais dans le cimetière de Saint-Pancrace.

Le jour de cette seconde victoire fut clos par une scène touchante. La garnison de Wisrhad, fidèle à son serment, se rendit à ceux de Prague avec toutes les machines de guerre de la citadelle. Les assiégeants reçurent les assiégés à bras ouverts. Ils se hâtèrent d’assouvir la faim qui les dévorait depuis si longtemps, et leur donnèrent des vêtements, des vivres à emporter, et tout ce qui leur était nécessaire pour se retirer en bon état et en bon ordre. Le lendemain, au point du jour, on vit la population en masse inonder la citadelle, non pour la fortifier, mais pour la détruire. Il fallait anéantir cette place meurtrière, arme si sûre et si redoutable aux mains de l’ennemi ; ce fut l’affaire de deux jours. Elle avait duré sept cents ans, et devint un jardin potager. Le 3 novembre, les Praguois allèrent en procession sur le champ de bataille, et rendirent grâces à Dieu dans leurs hymnes bohémiens.

L’empereur se vengea de sa défaite en ravageant les terres des Podiebrad. Un seul de ces seigneurs avait re-