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ces droits, vous ne vous apercevez pas que vous le feriez rétrograder et que vous circonscririez étrangement son rôle, s’il se rendait à vos conseils et s’il accomplissait cette parole de vous, monsieur, rappelée par M. Sainte-Beuve dans son article de novembre 1836 : « Il a le goût du schisme, qu’il en ait donc le courage ! » Cette parole est belle, mais elle ne nous paraît point applicable à M. de la Mennais. Il nous est impossible de ne voir dans M. de La Mennais qu’un schismatique, et de croire qu’il n’a pas d’autre destinée à remplir que celle de former une secte religieuse. Aujourd’hui ce serait une occupation bien stérile, et, quoi qu’on en dise, M. de La Mennais en eût-il le goût, il connaît trop bien, je pense, les choses et les hommes, pour borner ses vues à l’érection d’une petite église dans le goût de M. Chatel. Ce ne sont point des questions de dogme ni de discipline qui ont amené la rupture de M. de La Mennais avec Rome. Ce sont des questions toutes morales, toutes sociales, toutes politiques, par conséquent bien autrement vastes et sérieuses. M. de La Menais est donc bien autre chose qu’un schismatique ; c’est un grand moraliste politique, un philosophe religieux, car c’est au moment même où vous lui refusez l’intelligence de la philosophie que, par un puissant effort philosophique, il se détache du vieux monde catholique, pour entrer à pleines voiles, avec les générations nouvelles, dans le mouvement révolutionnaire. Ce n’est point non plus un utopiste, comme il vous plaît d’appeler Bentham, Saint-Simon et Fourier, puisque vous lui reprochez précisément de n’avoir pas donné la formule du nouvel état social qu’il appelle de ses vœux. C’est vous qui le conviez à l’utopie, et toute accusation à cet égard n’a d’existence que dans le désir qu’on a peut-être de la lui voir justifier.

Nous n’admettons donc pas que M. de La Mennais