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qu’il en doit tirer. À cela il n’y a qu’une chose à répondre, c’est que M. de La Mennais ne se donne ni pour un prophète, ni pour un révélateur, qu’il enseigne ce qu’il croit et ce que beaucoup avec lui croient juste, bon et nécessaire ; qu’il attaque du présent tout ce qui lui en semble mauvais, sans être obligé de dire précisément ce qu’il faut mettre à la place ; qu’il appelle de tous ses vœux l’avenir, sans savoir exactement ce qu’il sera, parce que, plein de confiance en Dieu et d’espérance dans les destinées de l’humanité, il pense que le mal engendre souvent le bien, jamais le pire, et que le bien amène le mieux sans pouvoir ramener le mal, et qu’enfin il lui est permis d’ignorer la solution mathématique d’un problème que quarante siècles et notre génération toute entière n’ont pas encore su résoudre.

De tout ce que nous avons dit, il nous semble résulter que la bourgeoisie n’est pas un fait nécessaire et invincible, que le peuple est le seul et réel souverain ; que M. de La Mennais, en lui parlant à la fois de droit et de devoir, ne lui enseigne ni la sédition, ni l’abnégation, mais bien l’énergie et la modération, et qu’il est fondé, sur les malheurs du présent, à demander mille changements à l’avenir, sans être obligé de prédire la forme particulière d’aucun.

Vous terminez en conseillant à M. de La Mennais de faire de nouvelles tentatives pour concilier la science et la foi. M. de La Mennais n’est-il donc, à vos yeux, qu’un homme de foi et de sentiment ? Parmi les esprits véritablement élevés, en existe-t-il qui soient tout à la foi ou tout à la science ? La foi et la science ne sont-elles pas le complément l’une de l’autre, nécessairement et indissolublement, liées l’une à l’autre ? Qu’est-ce que la science, si ce n’est la recherche des certitudes ? Qu’est-ce que la foi, si ce n’est, selon son intensité, l’aspira-