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vernes et les mauvais lieux, ou du moins que je me livrasse à mes vices en secret…

GABRIEL.

Ainsi vous croyez que c’est pour l’honneur de la famille que je m’offre à vous rendre service ?

ASTOLPHE.

Cela peut être ; on fait beaucoup de choses dans notre famille par amour-propre.

GABRIEL.

Et encore plus par rancune.

ASTOLPHE.

Comment cela ?

GABRIEL.

Oui ; on se hait dans notre famille, et c’est fort triste.

ASTOLPHE.

Moi, je ne hais personne, je vous le déclare. Le ciel vous a fait riche et raisonnable ; il m’a fait pauvre et prodigue : il s’est montré trop partial peut-être. Il eût mieux fait de donner au sang des Octave un peu de l’économie et de la prudence des Jules, au sang des Jules un peu de l’insouciance et de la gaieté des Octave. Mais enfin, si vous êtes, comme vous le paraissez, mélancolique et orgueilleux, j’aime encore mieux mon enjouement et ma bonhomie que votre ennui et vos richesses. Vous voyez que je n’ai pas sujet de vous haïr, car je n’ai pas sujet de vous envier.

GABRIEL.

Écoutez, Astolphe ; vous vous trompez sur mon compte. Je suis mélancolique par nature, il est vrai ; mais je ne suis point orgueilleux. Si j’avais eu des dispositions à l’être, l’exemple de mes parents m’en aurait guéri. Je vous ai semblé un peu philosophe ; je le suis assez pour haïr et renier cette chimère qui met l’isolement, la haine