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LE PRINCE, de même.

Au contraire. Vous avez atteint le but mieux que je ne l’aurais fait moi-même. Ce caractère m’offre plus de garantie de discrétion que je n’eusse osé l’espérer.

LE PRÉCEPTEUR, à part.

Cœur de pierre !

(Ils sortent.)



Scène VI.

GABRIEL, seul.

Le voilà donc, cet horrible secret que j’avais deviné ! Ils ont enfin osé me le révéler en face ! Impudent vieillard ! Comment n’es-tu pas rentré sous terre, quand tu m’as vu, pour te punir et te confondre, affecter tant d’ignorance et d’étonnement ! Les insensés ! comment pouvaient-ils croire que j’étais encore la dupe de leur insolent artifice ? Admirable ruse, en effet ! M’inspirer l’horreur de ma condition, afin de me fouler aux pieds ensuite, et de me dire : Voilà pourtant ce que vous êtes… voilà où nous allons vous reléguer si vous n’acceptez pas la complicité de notre crime ! Et l’abbé ! l’abbé lui-même que je croyais si honnête et si simple, il le savait ! Marc le sait peut-être aussi ! Combien d’autres peuvent le savoir ? Je n’oserai plus lever les yeux, sur personne. Ah ! quelquefois encore je voulais en douter. Ô mon rêve ! mon rêve de cette nuit, mes ailes !… ma chaîne !

(Il pleure amèrement. S’essuyant les yeux.)

Mais le fourbe s’est pris dans son propre piège, il m’a livré enfin le point le plus sensible de sa haine. Je vous punirai, ô imposteurs ! je vous ferai partager mes souffrances ; je vous ferai connaître l’inquiétude, et l’insomnie, et la peur de la honte… Je suspendrai le châtiment à un cheveu, et je le ferai planer sur ta tête blanche, à vieux Jules ! jusqu’à ton dernier soupir. Tu m’avais