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jean ziska.

toutes les résistances des sectes étaient une protestation du peuple contre cette révoltante inégalité, conquise, non par les armes de la vertu, de la sagesse, de la science, de l’amour, de la véritable sainteté, mais par un privilège digne des impostures des antiques hiérophantes. Le nouveau clergé qui surgissait en Bohême n’avait garde de rejeter de tels moyens. La noblesse et l’aristocratie, qui faisaient, là comme ailleurs, cause commune avec lui, ne se souciaient pas d’examiner le dogme au point de s’en désabuser. Mais le bas peuple, à qui la suprême droiture de la logique naturelle et la profonde suprématie du sentiment tiennent lieu de science dans de telles questions, voyait au fond de ces mystères mieux que l’Université, mieux que le Sénat, mieux que l’aristocratie, mieux que Ziska lui-même, son chef politique. Il est à remarquer, en outre, qu’à cette époque, grâce aux prédications d’une foule de docteurs hérétiques, dont les historiens parlent vaguement, mais sur l’action desquels ils sont unanimes, le peuple de Bohême était singulièrement instruit en matière de religion. Les envoyés diplomatiques de l’église de Rome en furent stupéfaits. Ils rapportèrent que tel paysan, qu’ils avaient interrogé, savait les Écritures par cœur d’un bout à l’autre, et qu’il n’était pas besoin de livres chez les Taborites, parce qu’il s’en trouvait de vivants parmi eux.

Un dernier mot pour résumer la situation des esprits à Prague en 1420. Je demande pardon à mes lectrices d’interrompre le drame des événement par une dissertation un peu longue. Les événements sont impossibles à comprendre, dans cette révolution surtout, si on ne se fait pas une idée des causes. Je trouve, dans le savant auteur dont je donne un résumé, cette réflexion bien légère pour un homme si lourd : « Si le rétablissement de la coupe était d’une assez grande nécessité, pour mettre en combustion