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jean ziska.

permettaient à leurs disciples laïques d’administrer la communion et de se communier eux-mêmes, refusaient d’entendre la confession auriculaire, niaient le monopole ecclésiastique de tous les sacrements, n’exerçaient, en un mot, qu’un ministère d’enseignement et de prédication. Peut-être l’Église d’aujourd’hui, qui, malgré ses puffs et ses réclames, marche rapidement à sa ruine au milieu des fêtes et des mascarades, fera-t-elle bien, dans ses intérêts, quand le temps fatal sera venu, de se borner à ces moyens sincères et sublimes des prêtres taborites. Il est certain que jamais clergé n’eut une autorité morale plus étendue, et ne rassembla d’aussi fervents adeptes, et cela dans un temps où le seul nom de prêtre allumait la rage des populations.

Il est certain que, de nos jours déjà, des membres du clergé de France ont eu la généreuse et courageuse pensée de réhabiliter, par le renoncement et la prédication évangélique, la mission du prêtre ; mais de ce moment ils ont été taxés d’hérésie. Il a fallu se soumettre à l’Église ou se séparer d’elle, car qui dit Église dit Charte de certains pouvoirs immobilisés dans la société contre les progrès de l’esprit public et les inspirations individuelles.

On conçoit maintenant pourquoi le dogme de la présence réelle intéressait si fort l’église calixtine. L’homme qui s’arroge le pouvoir miraculeux de faire descendre la Divinité dans sa coupe, et qui est réputé seul assez pur pour tenir la matière divine dans ses mains, est revêtu, aux yeux des simples, d’un caractère magique. Il est un saint, un ange, il est presque Dieu lui-même. Il est peut-être plus que Dieu, puisqu’il commande à Dieu, et l’incarne à son gré dans la matière du pain. En imaginant ce dogme grossièrement idolâtrique, l’église romaine avait sanctifié la personne du prêtre ; elle l’avait élevé au-dessus de la multitude comme au-dessus des rois ; et