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triote, la plus originale pour l’artiste. Le cavarnier est le gamin de la Brenne. C’est le jeune garçon ou l’enfant qui élève, soigne et dompte le cheval sauvage. Pieds nus, tête nue, sans veste, le cavarnier galope sur le cheval nu. C’est tout au plus s’il admet le bridon, habitué qu’il est à diriger sa monture avec une corde qu’il lui passe dans la bouche. Celui qui a gagné le prix, cette année, avait je crois, neuf ou dix ans. En arrivant au but, il a glissé en riant sous le ventre de son cheval baigné de sueur, luisant et poli comme un glaçon, mais non pas aussi froid ; car il faisait, ce jour-là, 32 degrés de chaleur à l’ombre, et l’ombre est un mythe sur les plateaux de la Brenne. Un brave paysan ramassa l’enfant et l’éleva dans ses bras pour l’embrasser. Il riait et pleurait en même temps, car il savait le danger qu’avait bravé son fils, et les quelques minutes d’une course si rapide sous les yeux du public sont bien longues pour un père.

Mais ce danger est une bonne nourriture pour l’homme, et j’aime que le paysan soit cavalier de naissance. Il semble que cela le rende déjà libre et le grandisse de toute l’énergie, de toute la fierté que l’air des champs devrait souffler partout sur l’enfant de la nature.

Après les courses rustiques, et les courses de char, qu’il faudrait encourager partout, nous avons vu des courses fashionables. Elles ont été superbes, pleines de luxe, d’émotion, de courage et d’habileté. Mais il n’est pas de notre ressort de parler bien savamment de ces joutes élégantes. Les cavaliers applaudis de tout cœur et les victorieux intrépides n’ont pas besoin d’encouragements. Ils apportent à Mézières la gloire de leurs prouesses, et nous ne saurions rien y ajouter qui ne fût un hommage superflu.

Quant à nous, paisibles cavaliers et raisonnables voyageurs de la Vallée-Noire, nous devons prendre l’engage-