Page:Sand - Isidora, 1845.djvu/202

Cette page n’a pas encore été corrigée

roide et pâle comme une statue de marbre blanc, les yeux ouverts et fixes, elle n’avait aucune connaissance, aucun sentiment de sa situation ; si Laurette ne l’eût sentie respirer faiblement, elle l’eût crue morte : mais comme elle respirait et ne pouvait exprimer sa souffrance, la bonne Allemande s’imagina parfois qu’elle dormait les yeux ouverts.

Heureusement l’affection fait parfois deviner aux êtres les plus simples ce qui peut nous sauver. Laurette sentant le corps d’Alice si froid et si contracté, ne songea qu’à la réchauffer, et elle finit par amener une légère transpiration. Peu à peu Alice revint à elle-même, et le premier mot qu’elle put articuler, fut pour demander à son humble amie si elle avait parlé.

— Hélas ! Madame, répondit Laurette, vous en étiez bien empêchée. Voyons si vous n’avez point la langue coupée ou les dents cassées ; car je n’ai jamais pu vous faire avaler une seule goutte d’eau. Dieu soit loué ! votre belle bouche n’a rien de moins, et maintenant que vous voilà mieux, il vous faut le médecin et du bouillon.

— Tout ce que tu voudras, Laurette. À présent, j’ai ma tête, je vois clairement. Je souffre beaucoup, mais je suis en possession de ma volonté. Embrasse-