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hélas ! je ne suis pas même sûre de n’avoir pas rêvé. Ah ! si je pouvais, si j’osais raconter ! Tenez, c’est comme pour aimer : Vorrei e non vorrei.

— Eh bien, Julie, répondit Alice en étouffant un profond soupir ; car les paroles d’Isidora l’avaient remplie d’effroi et navrée de tristesse : parlez et racontez. Vous en avez trop dit, et j’en ai trop entendu pour en rester là. Oubliez que vous parlez à la sœur de votre mari. Et pourquoi, d’ailleurs, ne serait-elle pas votre confidente ? Lui vivant, vous eussiez pu chercher en elle un soutien contre votre propre faiblesse, un refuge dans vos courageux repentirs. À présent que je ne peux plus lui conserver ou lui rendre les bienfaits de votre affection, je peux, du moins, accomplir son dernier vœu, en remplissant, auprès de vous, le rôle d’une sœur.

— Appelez-moi votre sœur ! dites ce mot adorable, ma sœur, s’écria Isidora en embrassant avec énergie les genoux d’Alice. Oh ! s’il est possible que vous m’aimiez ainsi, oui, je jure à Dieu que, moi, je pourrai encore aimer et croire !

En cet instant Isidora parlait avec l’élan de la conviction, et tout ce qu’elle avait encore de pur et de bon dans l’âme rayonnait dans son beau regard. Alice l’embrassa et lui donna le nom de sœur, en