Page:Sand - Isidora, 1845.djvu/152

Cette page n’a pas encore été corrigée

En vérité, Jacques, vous êtes bien maladroit, et le secret d’une femme vertueuse, comme vous dites, est en grand danger dans vos mains.

— Est-ce là tout ce que vous aviez à me dire ? reprit Jacques irrité, en se levant à son tour. Je croyais bénir le jour où je vous retrouverais digne d’une noble et fidèle amitié ; mais je vois bien que Julie est morte, en effet, comme vous le disiez tout à l’heure, et qu’il ne me reste plus qu’à pleurer sur elle.

— Ah ! malheureux, ne blasphème pas ! s’écria-t-elle en se tordant les mains ; que ne peux-tu dire la vérité ? pourquoi Julie n’est-elle pas morte et ensevelie à jamais au fond de ton cœur et du mien ? mais l’infortunée ne peut pas mourir. Cette âme pure et généreuse s’agite toujours dans le sein meurtri et souillé d’Isidora ; elle s’y agite en vain, personne ne veut lui rendre la vie ; elle ne peut ni vivre ni mourir. Vraiment je suis un tombeau où l’on a enfermé une personne vivante. Ah ! philosophe sans intelligence et sans entrailles, tu ne comprends rien à un pareil supplice, et cette agonie te fait sourire de pitié. Sois maudit, toi que j’ai tant aimé, toi que seul parmi tous les hommes, je croyais capable d’un grand amour ! puisses-tu être puni du même