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DE GRIBOUILLE

demander quelque grâce, rendre compte de quelque mission, ou manifester quelque repentir. Mais les mauvais génies sont orgueilleux, et ils viennent rarement faire sincèrement leur soumission. Le roi Bourdon venait plutôt là pour narguer la reine. Il le fit bien voir, car il lui rappela qu’elle-même avait prononcé que sa peine expirerait la quatre centième année, et qu’il reprendrait l’empire de ton pays à ce moment-là : « Par conséquent, disait-il, ce Gribouille m’appartient, et la reine des prés (je passe les épithètes grossières dont il m’honora) n’a pas le droit de me l’enlever pour le douer et l’instruire à sa fantaisie. » La reine des fées, ayant réfléchi, prononça cette sentence : « La reine des prés, ma fille, a doué cet enfant des hommes de douceur et de bonté ; nul ne peut détruire le don d’une fée, quand il est prononcé par elle sur un berceau. Gribouille sera donc doux et bon ; mais il est bien vrai que Gribouille vous appartient. Eh bien, je vais prendre une mesure qui, si vous êtes raisonnable, vous empêchera de le tourmenter et de le faire souffrir. Vous ne serez délivré que de sa main. Le jour où il vous dira : « Va, et sois heureux, » vous cesserez d’être un simple bourdon ; vous pourrez quitter votre vieux chêne et régner sur le pays. Mais souvenez-vous de rendre Gribouille très heureux ; car, le jour où il voudra vous quitter, je permettrai