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HISTOIRE

bout, il manda Gribouille dans son cabinet, et lui dit :

« On m’assure, mon cher Gribouille, que vous avez un bouquet de fleurs souveraines pour toutes sortes de maux ; or, comme j’ai un grand mal de tête, je vous prie de me le faire sentir ; peut-être que cela me soulagera. »

En ce moment, Gribouille oublia que sa marraine lui avait dit : « Tu ne pourras rien sur le roi des bourdons ni sur ceux de sa famille ; mes fleurs elles-mêmes sont sans vertu sur ces méchants esprits. » Le pauvre enfant pensa, au contraire, que des plantes si rares auraient le don d’adoucir la méchante humeur du roi. Il tira de son sein le précieux bouquet, qui était toujours aussi frais que le jour où il l’avait cueilli et que nul pouvoir humain n’eût pu lui arracher, puisque tous ceux qui le respiraient en subissaient le charme. Il le présenta au roi, et aussitôt celui-ci enfonça son dard empoisonné dans le cœur de la plus belle rose. Un cri perçant et une grosse larme s’échappèrent du sein de la rose, et Gribouille, saisi d’horreur et de désespoir, laissa tomber le bouquet.