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Et alors, malheur aux vieilles amies qui avaient causé une altercation domestique par leurs propos et leurs réflexions ! Les vieilles comtesses, c’étaient les bêtes de l’Apocalypse pour ma pauvre mère, et elle les habillait de la tête aux pieds avec une verve et une causticité qui faisaient rire ma grand’mère elle-même, malgré qu’elle en eût.

Deschartres, il faut bien le dire, était le principal obstacle à leur complet rapprochement. Il ne put jamais prendre son parti là-dessus, et il ne laissait pas tomber la moindre occasion de raviver les anciennes douleurs. C’était sa destinée. Il a toujours été rude et désobligeant pour les êtres qu’il chérissait ; comment ne l’eût-il pas été pour ceux qu’il haïssait ? Il ne pardonnait pas à ma mère de l’avoir emporté sur lui dans l’influence à laquelle il prétendait sur l’esprit et le cœur de son cher Maurice. Il la contredisait et essayait de la molester à tout propos, et puis il s’en repentait et s’efforçait de réparer ses grossièretés par des prévenances gauches et ridicules. Il semblait parfois qu’il fût amoureux d’elle. Eh ! qui sait s’il ne l’était pas ? Le cœur humain est si bizarre et les hommes austères si inflammables ! Mais il eût dévoré quiconque le lui eût dit.

Il avait la prétention d’être supérieur à toutes les faiblesses humaines. D’ailleurs ma mère recevait mal ses avances, et lui faisait expier ses torts par de si cruelles railleries, que