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avec l’intention de faire rompre le mariage de son fils, espérant même qu’il y consentirait, car jamais elle ne l’avait vu résister à ses larmes. Elle arriva d’abord à Paris à son insu, ne lui ayant pas fixé le jour de son départ, et ne l’avertissant pas de son arrivée comme elle en avait l’habitude. Elle commença par aller trouver M. Desèze qu’elle consulta sur la validité du mariage. M. Desèze trouva l’affaire neuve, comme la législation qui l’avait rendue possible.

Il appela deux autres avocats célèbres, et le résultat de la consultation fut qu’il y avait matière à procès, parce qu’il y a toujours matière à procès dans toutes les affaires de ce monde, mais que le mariage avait neuf chances contre dix d’être validé par les tribunaux : que mon acte de naissance me constituait légitime, et qu’en supposant la rupture du mariage, l’intention, comme le devoir de mon père, serait infailliblement de remplir les formalités voulues, et de contracter de nouveau mariage avec la mère de l’enfant qu’il avait voulu légitimer.

Ma grand’mère n’avait peut-être jamais eu l’intention formelle de plaider contre son fils. En eût-elle conçu le projet, elle n’en aurait certes pas eu le courage. Elle fut probablement soulagée de la moitié de sa douleur en renonçant à ses velléités hostiles, car on double son propre mal en tenant rigueur à ce qu’on aime. Elle voulut cependant passer encore quelques jours sans voir son fils, sans doute afin d’épuiser les résistances de