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de mon ame, dans les fatalités de mon organisation, dans les traits de mon visage. Mon père est un reflet, affaibli sans doute mais assez complet, du sien. Le milieu dans lequel j’ai vécu a amené les modifications. Mes défauts ne sont donc pas son ouvrage absolument, et mes qualités sont un des instincts qu’il m’a transmis. Ma vie extérieure a autant différé de la sienne que l’époque où elle s’est développée, mais eussé-je été garçon et eussé-je vécu vingt-cinq ans plus tôt, je sais et je sens que j’eusse agi et senti en toutes choses comme mon père.

Quels étaient, en 97 et en 98, les projets de ma grand’mère pour l’avenir de son fils ? Je crois qu’elle n’en avait pas d’arrêtés et qu’il en était ainsi pour tous les jeunes gens d’une certaine classe.

Toutes les carrières ouvertes à la faveur sous Louis XVI l’étaient sous Barras à l’intrigue. Il n’y avait rien de changé en cela que les personnes, et mon père n’avait réellement qu’à choisir sa place entre les camps et le coin du feu. Son choix, à lui, n’eût pas été douteux : mais depuis 93 il s’était fait chez ma grand’mère une réaction assez concevable contre les actes et les personnages de la Révolution. Chose très remarquable, pourtant, sa foi aux idées philosophiques qui avaient produit la Révolution n’avait pas été ébranlée, et en 97, elle écrivait à M. Heckel une lettre excellente que j’ai retrouvée. La voici :