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cherchent à se faire médecins, chirurgiens, avocats. Les plus robustes ont été employés pour la République. Depuis six ans, personne n’a travaillé, il faut bien le dire, et les livres ont eu tort. On ne voit que des gens qui cherchent des instituteurs pour leurs enfans et qui n’en trouvent pas. Il y aura donc beaucoup d’ânes dans quelques années d’ici, et j’en serais un comme un autre sans Deschartres, que dis-je ? sans ma bonne mère, qui aurait toujours suffi à former mon esprit et mon cœur. »


« Le 13.

« Nous partons demain. Deschartres se décide enfin à mettre ses estimables jambes dans des bottes. Il n’y pas moyen de lutter contre le torrent ! C’est commode à cheval, mais non au bal. On ne fait plus que marcher la contredanse. Dis à ma bonne que je vais m’en dédommager en la faisant sauter et pirouetter de gré ou de force. Adieu, Paris… et bonjour à toi bientôt, ma bonne mère ! je pars d’ici plus fou que je n’y suis venu ; c’est qu’aussi tout le monde l’est un peu ; il suffit d’avoir la tête sur les épaules pour se croire heureux. Les parvenus s’en donnent à cœur joie, et le peuple a l’air d’être indifférent à tout ; jamais le luxe n’a été si brillant… Bah ! bah ! adieu à toutes ces vanités, ma bonne mère s’ennuie et m’attend : tant pis pour ma jument. Je vais enfin t’embrasser ! Peut-être arriverai-je avant cette lettre !

« MAURICE. »