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c’était facile. Il ne parlait pas volontiers de Gaston et ne faisait pas de questions sur son compte. D’ailleurs, j’avais pris mon parti : ne pas trahir la comtesse, ne plus jamais servir la vengeance de son mari, ne pas troubler le bonheur de la mère recouvrant son fils ; mais tourmenter et humilier la femme au bras de son amant.

Je m’attachai à ses pas, et je devins aussi habile à ce triste métier d’espion que pas un limier de la police. Il me répugnait et me fatiguait, mais une fièvre intérieure me poussait et me soutenait. Peine inutile ! madame ne retourna plus seule au bois de Boulogne ni à aucune espèce de rendez-vous. Toutes ses démarches bravèrent le grand jour. Elle n’alla pas voir madame de Montesparre et parut irrévocablement brouillée avec elle.

De toutes les lettres qu’elle écrivit et dont il me fut possible de voir la suscription, aucune ne fut adressée à la baronne, ni à Salcède, ni à aucune personne qui pût m’être suspecte. J’eus beau chercher M. de Salcède à Paris, il fut introuvable ; si je ne l’eusse vu de mes propres yeux, si je n’eusse appris qu’il avait les cheveux blancs, si la Niçoise, sans le connaître, ne m’eût révélé son action sur elle, je me serais cru visionnaire.