Page:Sand - Flamarande.djvu/222

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour qu’il suivît son équipage ; mais elle ne faisait pas ou presque pas de visites, et c’était toujours dans des hôtels où les maîtres occupaient le rez-de-chaussée. Il n’y avait pas moyen de la rejoindre dans un escalier et de lui parler sur un palier quelconque. Elle n’allait ni chez sa couturière, ni chez sa modiste ; toutes ses fournisseuses la servaient à domicile. Aux promenades publiques, elle tenait toujours son fils par la main, et là d’ailleurs elle n’eût pas pu s’arrêter, encore moins se dérober pour parler à un valet de chambre. Un jour que je la suivais avec beaucoup d’espoir, car Roger était un peu enrhumé et elle était sortie sans lui, je la vis avec surprise prendre le chemin du bois de Boulogne. Il faisait très-sombre et très-humide, et ce n’était ni le jour ni l’heure pour se promener.

À cette époque-là, le bois n’était pas un parc royal à l’anglaise. Il n’y avait ni lacs, ni rochers, ni cascades, mais il y avait des arbres, des bruyères, des chemins où l’on entrait profondément dans le sable, des clairières mélancoliques, des endroits déserts en un mot, et, sachant que madame aimait ces endroits-là, je me disais qu’elle y mettrait pied à terre et que je pourrais l’entretenir en toute sécurité. Par malheur, je ne pouvais la suivre que d’assez loin, mon cocher avait un mauvais cheval : je la perdis de vue après qu’elle eut dépassé la porte Maillot, dont j’étais loin encore. Si peu qu’il y eût d’équipages ce jour-là, les traces des roues s’entre-