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m’aider à marcher, car je tremblais et perdais la tête, il m’a conduite à ce bois où vous attendiez. Pourquoi tout cela ? Je veux le savoir.

— Vous m’aviez juré, lui dis-je, de ne pas le demander.

— Je veux le savoir, ou, dès que je serai rendue chez nous, je fais ma déclaration au maire. Je ne veux pas me mettre une méchante affaire sur les bras.

J’eus beau donner à cette femme l’explication dont j’étais convenu avec M. le comte, elle ne voulait pas me croire, et je dus lui montrer la déclaration qu’il m’avait signée. Elle savait lire et parut se tranquilliser. Elle eut grand soin de l’enfant, et je l’aidai de mon mieux, assez inquiet au fond d’exposer un nouveau-né à une pareille course ininterrompue pendant quatre jours et quatre nuits. Il ne parut pas s’en apercevoir. Il restait tranquille comme s’il acceptait la vie dans n’importe quelles conditions. Il nous rendit le voyage plus facile et moins dangereux que je ne m’y étais attendu. La Niçoise, sauf la préoccupation du chagrin qu’elle causait à la véritable mère, était gaiement maternelle pour son nourrisson et ne se plaignait de rien. Elle avait une grande joie de revoir les oliviers grisâtres et les collines pierreuses de son pays. Elle me le vantait avec l’emphase méridionale. Selon elle, son village était le plus bel endroit de l’univers.