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furieuse bat le navire. Elle la contemple et l’admire. La vague menace de l’emporter. Elle se fait attacher sur le pont (d’autres l’ont raconté), et, là, elle compose des vers où le secret de son intrépidité se révèle.

Oui, de jours et d’ennuis, j’en ai trop, Dieu terrible !

Ce lourd fardeau, longtemps faudra-t-il le porter ?
Comme un nid balancé sur la branche du saule,

Et qu’un enfant folâtre en arrache en ses jeux,
Tombe et, jouet des vents, roule, fuit et s’envole
Sur le torrent rapide aux tourbillons neigeux,
Telle, au gré des autans, sur la vague infidèle,
Sans qu’aucun astre ami protège son retour,
Errante et loin du port flotte l’arche si frêle
Où, pauvre oiseau, je chante et gémis tour à tour.

Si ma prière, hélas ! ne doit être exaucée,
France si, loin de toi, je dois vivre et mourir.

Près de ce mât tremblant par la vague bercée,
De mon dernier sommeil si je dois m’endormir.
Si, sur moi, dès ce jour, cette onde courroucée

Doit rouler et mugir.

Ou, sur recueil désert, par la vague lancée,
Si ma cendre oubliée à jamais doit languir,

Eh bien, qu’il soit ainsi, qu’importe !…

Enfin, elle touche le port, elle revoit la France, elle est de retour à Rodez en 1840. Je crois qu’elle fait d’autres voyages, car elle chante un