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tre. Il ne mérita pas davantage d’être rabaissé jusqu’à l’idiotisme. Il eut, comme homme privé, des qualités réelles. J’ai eu l’occasion de voir en lui un côté vraiment sincère et généreux. Il eut aussi un rêve de grandeur française qui ne fut pas d’un esprit sain, mais qui ne fut pas non plus d’un esprit médiocre. Vraiment la France serait trop avilie si elle avait subi pendant vingt ans la toute-puissance d’un crétin travaillant pour lui seul. Il faudrait désespérer d’elle à tout jamais. La vérité est qu’elle prit ce météore pour un astre et ce songeur silencieux pour un homme profond. Puis, quand elle le vit succomber à des désastres qu’elle eût dû prévoir et prévenir, elle le prit pour un lâche.

Il ne l’était pas, il avait un courage froid et je ne crois pas qu’il tînt à la vie. Il se sentit écrasé, désillusionné de son rôle, peut-être las de lui-même.

On a sans doute conspiré beaucoup autour de lui dans son dernier exil. On doit avoir hâté sa fin en stimulant ce reste de vie, qui fut employé, des gens bien informés me l’ont dit, devinez à quoi ? à faire des paysages à l’aquarelle qui lui plaisaient beaucoup.