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m’aurez entendu, et vous allez m’entendre pour la première, pour la dernière fois peut-être… Pourquoi cette frayeur insensée, et ces larmes, et cette colère d’enfant ? Je sais maintenant que vous m’aimez ; et, vous qui savez combien je vous aime, vous ne pouvez pas avoir peur de moi. Abjurons donc toute feinte. Je vais vous en donner l’exemple, et vous entendrez ma confession comme j’ai entendu la vôtre. Jusqu’ici, Cosima, je me suis trompé : j’ai pris votre résistance pour de la coquetterie, votre sagesse pour l’amour d’une vaine gloire ; mais tout à l’heure, ici (montrant le confessionnal), vous vous êtes justifiée. Oh ! je sais à présent que votre âme est aussi belle que vos traits, et, moi qui vous aimais comme on aime une femme, je suis à genoux devant vous comme devant un ange. Ne me craignez donc plus. Je serai calme, je serai patient. Je vous aimerai dans le silence, dans le mystère, dans la résignation. Je ne vous verrai plus qu’à votre insu. Je ne vous compromettrai plus… Je ne vous demande pas pardon de l’avoir fait. Ce n’est point par des paroles que je prétends vous prouver mon repentir et ma passion. Mais je mériterai mon pardon, et je l’obtiendrai peut-être !

COSIMA.

Et vous me parlez ainsi, me meurtrissant le bras, et l’épée à la main ?

ORDONIO, mettant un genou en terre devant elle et lui présentant son épée.

Disposez de moi comme de votre esclave. Je vous donne mon cœur et ma vie.

Cosima profite de cet instant pour s’échapper. Elle fuit vers le fond de l’église. Au même instant, Néri parait en désordre. Cosima s’élance vers lui, et Ordonio, toujours l’épée à la main, se retire dans l’ombre des colonnes.

COSIMA.

Est-ce donc vous enfin, Néri ? Est-ce ainsi que vous restez près de moi ?

NÉRI.

Mais vous-même,… pourquoi venez-vous de me quitter ?