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ORDONIO.

Moi !… je ne t’aime pas !

COSIMA.

Oh ! si vous m’aimiez, vous renonceriez à ce duel ; vous partiriez sans moi. Au lieu de m’imposer de honteuses conditions, au lieu de me forcer à déshonorer le nom d’Alvise et à briser son cœur par le scandale de cette fuite, vous iriez attendre loin de moi que le temps eût effacé vos ressentiments. Alvise finirait par comprendre qu’il y a là un plus grand courage que celui de se battre. Vous seriez consolé de cette séparation par ma reconnaissance, par mon respect !… Oh ! je te vénérerais comme un ange, si tu agissais ainsi !

ORDONIO.

Tu me le dis avec ce regard humide, avec ce divin sourire… et tu veux que je t’écoute ! Que tu es belle ainsi !… Cette pâleur…

COSIMA.

Ne me touchez pas !

ORDONIO, sèchement.

Ah çà ! vous me fuyez avec une répugnance… Si c’est une comédie pour me retenir en me flattant d’un vain espoir, et me faire manquer, en pure perte, à un rendez-vous d’honneur, ne comptez pas que je m’y laisse prendre. Il va froidement prendre son épée et feint de vouloir sortir.

COSIMA, hors d’elle-même.

Ne vous contenterez-vous pas de ma soumission ? faudra-t-il y ajouter la feinte ? Mon Dieu ! dois-je avoir le sourire sur les lèvres, quand j’ai la mort dans l’âme ?

ORDONIO.

Et lorsque je vous fais horreur, n’est-ce pas ? Oh ! non, non ! madame, ce n’est pas ainsi que je l’entendais, car, au fond, je me croyais aimé.

Il feint encore de vouloir sortir ; elle le retient.
COSIMA.

Oh ! tenez !… vous l’étiez !… vous le savez bien.