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tous les sens, divin et naturel. Mes pauvres enfants ne me répondent encore que par des larmes ; ils ont trop aimé ce premier enfant, ils craignent de ne pas aimer le second ; ce qui prouve, hélas ! qu’ils l’aimeront trop encore ! mais peut-on se dire qu’on limitera les élans du cœur et des entrailles ?

Vous me dites, ami, que vous me comparez quelquefois à la France ; je sens du moins que je suis Française, à cette conviction souveraine, qu’il ne faut pas compter les chutes, les blessures, les vains espoirs, les cruels écrasements de la pensée, mais qu’il faut toujours se relever, ramasser, rassembler les lambeaux de son cœur accrochés à toutes les ronces du chemin, et aller toujours à Dieu avec ce sanglant trophée.

Me voilà loin de mon sermon sur la santé ; pourtant, j’y reviens naturellement. Votre vie est précieuse, quelque brisée ou déchirée qu’elle soit. Faites donc tout au monde pour nous la garder.

Adieu, ami ; je vous aime. Maurice aussi, lui !

GEORGE SAND.