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place de mes deux fillettes et un baptême catholique à la place d’un baptême protestant. Ça ne fait rien, il faut bien mentir un peu pour se distraire.


DCLXXXVIII

À M. ÉMILE ROLLINAT, EN GARNISON À PERPIGNAN


Nohant, 2 janvier 1869.


Cher enfant,

Merci de votre bon souvenir. Je suis heureuse de vous savoir content, c’est la marque d’un caractère solide et d’un esprit sérieux ; car, puisque tous ceux de votre âge se plaignent, ne se trouvent bien placés nulle part et voudraient commander à la destinée, ce n’est pas tant le manque de philosophie que le manque de force qui fait ces âmes aigries, pleines d’exigence. Vous vous trouvez content d’avoir un état et vous savez vous y faire des loisirs utiles, un fonds d’études qui vous servirait au besoin. Je suis bien sûre à présent que l’avenir est à vous, que le destin ne vous traînera pas après lui, mais que vous le pousserez lui-même en avant. Les chagrins que vous rappelez, votre bien-aimé père me les avait confiés, et je l’ai vu bien tourmenté de votre avenir. Ce que je vous dis aujourd’hui, je le lui disais ; car il me décrivait votre caractère, vos aptitudes, et on voyait sa tendresse dominer ses