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est toute ronde à présent ; ce qui ne l’empêche pas de se faire belle demain pour aller à un concert — pour les Polonais. Mais elle ne chantera pas : elle a un peu de rhume, notre petiote aussi ; tout cela n’est rien. Nous supportons tous on ne peut mieux ce rude hiver. Lina, toujours active, va et vient dans sa petite voiture, et Maurice nous régale de marionnettes.

On s’apprête, pour le jour de l’an, à une grande représentation ; la mortadelle et le stracchino, toujours infiniment estimables, seront les bienvenus, et, quant à ce que l’inspiration te dictera d’ailleurs, pourvu que ce soit italien, Linette le dégustera religieusement.

Nous avons besoin de nous distraire et de nous secouer en famille ; car l’air du dehors est bien triste ; je crois que toutes les âmes sont gelées, puisqu’on supporte la politique du jour en France, et que M. Thiers devient le dieu du moment en renchérissant sur les beaux principes de la majorité. Jolie opposition ! c’est honteux ! vous pouvez bien dire à présent en Italie tout ce que vous voudrez contre nous, nous le méritons. Nous sommes idiots, nous sommes fous, nous sommes lâches ; voilà ce que l’autorité fait d’une nation. Mais on peut rager sans se décourager. L’indignation est grande et on pousse à l’extrême la situation. Nous verrons bien des choses d’ici à quelques années.

Je t’embrasse tendrement, mon cher vieux. Ne te laisse pas abattre par les événements. Maurice me