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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

votre besoin de secours intellectuel n’est pas une frivole inquiétude.

Oui, je vous connais sans vous avoir vue ; mais n’y a-t-il pas bientôt dix ans que vous m’écrivez ces grandes lettres où, au milieu des contradictions et des troubles d’une pensée ardente, j’ai toujours trouvé votre bonté si entière, si spontanée, si naïve, et votre jugement si généreux et si droit en tout ce qui est essentiel !

Demandez-lui de vous indiquer des livres qui vous sauvent, et, faites mieux, quittez cette solitude où vous vous consumez, où ce qui vous entoure vous laisse et vous rend encore plus seule, je le vois bien. Je ne connais pas assez M. Jean Reynaud pour vous adresser à lui, sans qu’il vous connaisse. Mais faites-vous connaître à lui ; son livre m’a fait un grand bien, à moi aussi, et j’avais grand besoin de trouver, dans la haute science d’un esprit de premier ordre, la confirmation raisonnée de tous mes instincts ; car mon courage a été bien éprouvé dernièrement !

J’ai perdu une enfant adorable et adorée, la fille de ma pauvre fille. Je viens d’être malade, ce qui m’a empêchée de vous répondre, et, maintenant, je suis encore si délabrée, que mon fils, mon cher fils, m’emmène voyager un peu. Je pars dans deux jours. Dans deux mois, je serai de retour à Nohant, où vous m’enverrez, j’espère, de meilleures nouvelles de vous. Avant de rentrer ici, je passerai quelques jours probablement à Paris. Si vous réalisez votre tentation d’y