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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

J’ai envoyé à Buloz la première partie du voyage de Maurice, qui ne traite que du temps qu’il a passé seul à Alger ; c’est amusant, mais sans intérêt direct pour vous. Il achève la seconde partie, qui vous sera envoyée avant d’être remise à Buloz ; mais la première partie est accompagnée d’une petite préface de moi que Buloz vous portera ou vous enverra s’il n’est pas malade, — car il l’est continuellement, — et qu’il n’imprimera qu’avec votre agrément. Si vous avez des observations à me faire, vous m’écrirez avec votre belle et bonne franchise, et je vous écouterai avec tout mon cœur.

Une chose me contrarie bien quand je parle de vous hors de l’intimité, c’est que vous soyez un grand personnage. Le monde est si sale et si plat, qu’on ne peut pas supposer qu’on aime un prince pour lui-même, et je suis forcée à une réserve que je n’aurais pas pour un camarade que j’aimerais beaucoup moins.

Ou bien, si on brave ces méprisables soupçons, comme, au bout du compte, on doit le faire quand on est fort de sa droiture, on a l’air de le faire par sotte vanité, et pour proclamer une amitié que les autres envient. Vous verrez si j’ai su passer à travers ces écueils. Républicaine toujours ! mais, convaincue que vous seriez le meilleur chef d’une république, ou la meilleure compensation à une république impuissante à renaître, je me moque pour mon compte de l’accusation de trahison que quelques-uns ne m’épargnent pas ; mais, à propos d’un travail aussi jeune et