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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

que vous grandissiez en maturité dans la science de la vie. Il est routinier et les rapides progrès l’étourdissent. Il y résiste et les combat tant qu’il peut. Pour peu qu’on le craigne, qu’on le ménage, il croit être fort ; mais, au fond, il est bon enfant et il vous reviendra, aussi assidu et aussi passionné qu’auparavant si vous ne pliez pas. Guérissez-vous, distrayez-vous surtout, oubliez un peu ces luttes pénibles et, si vous laissez dire que vous êtes malade et découragé, que ce soit pour jeter votre béquille un beau matin et lui montrer que vous êtes plus fort que jamais.

Voilà, cher fils, ce que, depuis quelques jours, je voulais vous dire ; mais je n’étais pas encore assez forte pour écrire plus d’une ou deux pages. Venez me voir quand il fera moins mauvais et quand vous ne serez plus si tenu par le traitement. Je compte aller dans le Midi en février. Vous devriez en faire autant. Voyons, voyons, il faut retrouver cette grande énergie physique et intellectuelle qui vous a inspiré de si belles choses.

Songez que vous avez été l’enfant gâté de la destinée et que vous l’êtes encore ; car vos moindres succès seraient des succès de premier ordre pour les autres.

Si vous vous sentez bas et affaibli, dites-vous que c’est peut-être un bien ; car, dans les bonnes organisations, ce sont des crises qui présagent un renouveau superbe. Patientez, traînez-vous en souriant, et répétez-vous sans cesse : Ça passera !