Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 3.djvu/333

Cette page a été validée par deux contributeurs.
330
CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

clusives. Je ne vous ai jamais tourmenté de vaines discussions à cet égard. Je ne connaissais pas assez l’Italie, je ne la connais pas encore assez pour oser dire que ce cadre fût insuffisant pour ses aspirations et ses besoins ; vous regardant comme un des trois ou quatre hommes les plus avancés, les plus forts de cette nation, j’ai cru devoir vous dire, lorsque vous parliez à l’Italie : « Dites toujours ce que vous croyez être la vérité. » Oui, j’ai dû vous dire cela, et je vous le dirais encore si vous parliez à l’Italie au milieu du combat. Quand on se bat, pourvu qu’on se batte bien, tout stimulant ardent et sincère concourt à la victoire. Mais, dans la défaite, ne faut-il pas devenir plus attentif et plus scrupuleux ? Songez que vous parlez maintenant non plus à une nation, mais à un parti vaincu dans des circonstances si peu comparables à celles de l’Italie livrée à l’étranger, que ce que vous pouviez crier alors comme le pape de la liberté romaine n’a plus de sens pour des oreilles françaises, étourdies, brisées par le canon de la guerre civile !

Écoutez-moi, mon ami ; ce que je vais vous dire est très différent de ce que vous disent probablement mes amis à Londres et en Belgique. À coup sûr, c’est tout à fait l’exposé de ce que pensent la plupart de mes amis et connaissances politiques en France.

Nous sommes vaincus par le fait, mais nous triomphons par l’idée. « La France est dans la boue, » dites-vous ? c’est possible ; mais elle ne s’arrête pas dans cette boue, elle marche, elle en sortira. Il n’y a pas