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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

lutter. Maintenant, je ne le vois plus ; mais je vois l’opinion et j’aperçois de temps en temps l’entourage : ou je me trompe bien, ou l’homme est perdu, mais non le système, et à lui va succéder une puissance de réaction d’autant plus furieuse, que la douceur du tempérament de l’homme sacrifié n’y sera plus un obstacle. Maintenant, le peuple et la bourgeoisie, qui murmurent et menacent à qui mieux mieux, sont-ils d’accord pour ressaisir la République ? ont-ils le même but ? le peuple veut-il ressaisir le suffrage universel ? la bourgeoisie veut-elle le lui accorder ? qui se mettra avec ou contre l’armée si elle égorge de nouveau les passants dans les rues ?

Que ceux qui croient à des éléments de résistance contre ce qui existe espèrent et désirent la chute de Napoléon ! Moi, ou je suis aveugle ou je vois que le grand coupable, c’est la France, et que, pour le châtiment de ses vices et de ses crimes, elle est condamnée à s’agiter sans solution durant quelques années, au milieu d’effroyables catastrophes.

Le président, j’en reste et j’en resterai convaincue, est un infortuné, victime de l’erreur et de la souveraineté du but. Les circonstances, c’est-à-dire les ambitions de parti, l’ont porté au sein de la tourmente. Il s’est flatté de la dominer ; mais il est déjà submergé à moitié et je doute qu’à l’heure qu’il est, il ait conscience de ses actes.

Adieu, mon ami ; voilà tout pour aujourd’hui. Ne me parlez plus de ce qu’on dit et écrit contre moi. Cachez-