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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

attendre tout du temps, et de la maturité de la question sociale (vous l’aviez dit devant moi, l’avant-veille, à votre club), vous avez fait ce que j’eusse probablement fait à votre place ; on vous a dit : « C’est une révolution, le peuple le veut, le peuple triomphe ; abandonnez-le ou marchez avec lui. » Vous avez accepté l’erreur et la faute du peuple, et vous avez voulu suivre son mouvement pour l’empêcher d’abuser de sa force s’il était vainqueur, ou pour périr avec lui s’il était foudroyé.

J’oserai vous dire que je regrette que vous n’ayez pas voulu accepter les débats : vous ne vous seriez pas défendu, il n’y a pas de danger qu’on vous y prenne, pauvre cher martyr ! mais vous auriez eu l’occasion de faire entendre des paroles utiles. Il est vrai qu’il vous eût fallu peut-être séparer votre cause de celle de certains coaccusés, lesquels, plus coupables peut-être que vous, se défendent bel et bien aujourd’hui. Je ne puis être juge de vos motifs personnels, et j’ai d’avance la certitude que vous avez pris, comme à l’ordinaire, le plus noble et le plus généreux parti.

Ce que je n’ai jamais bien compris et ce que vous m’expliquerez seulement quand nous nous verrons, — car, jusque-là, soyez tranquille, j’accepterai tout de vous avec la confiance la plus absolue dans vos intentions, — c’est le vote du milliard. Vous pensez bien que je ne m’occupe pas de la chose en elle-même ; mais je ne comprends pas bien l’opportunité