Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 2.djvu/87

Cette page a été validée par deux contributeurs.
84
CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND


CLXXVI

À M. GUSTAVE PAPET, À ARS (INDRE)


Fontainebleau, 24 août 1837.


Cher bon vieux,

J’ai perdu ma pauvre mère ! Elle a eu la mort la plus douce et la plus calme ; sans aucune agonie, sans aucun sentiment de sa fin, et croyant s’endormir pour se réveiller un instant après. Tu sais qu’elle était proprette et coquette. Sa dernière parole a été : « Arrangez-moi mes cheveux. »

Pauvre petite femme ! fine, intelligente, artiste, généreuse ; colère dans les petites choses et bonne dans les grandes. Elle m’avait fait bien souffrir, et mes plus grands maux me sont venus d’elle. Mais elle les avait bien réparés dans ces derniers temps, et j’ai eu la satisfaction de voir qu’elle comprenait enfin mon caractère et qu’elle me rendait une complète justice. J’ai la conscience d’avoir fait pour elle tout ce que je devais.

Je puis bien dire que je n’ai plus de famille. Le ciel m’en a dédommagée en me donnant des amis tels que personne peut-être n’a eu le bonheur d’en avoir. C’est le seul bonheur réel et complet de ma vie. On prétend que j’en ai eu de faux et d’ingrats. Je prétends, moi,