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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

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CLXIII

À M. JULES JANIN


Nohant, 15 février 1837.


Vous êtes bien aimable de m’avoir répondu si vite et si consciencieusement, mon cher camarade. Je vous remercie de votre excellente disposition pour Calamatta. J’avais envoyé mon mauvais feuilleton au Monde[1] lorsque j’ai reçu votre lettre, et je ne puis ni le reprendre, ni en recommencer un ; car je suis stupide à ce genre de travail.

Je suis totalement incapable de travailler dans les Débats. Je ne vous parle pas des opinions, qui sont choses sacrées, même chez une femme ; mais seulement de la manière d’envisager la question littéraire. Songez que je n’ai pas l’ombre d’esprit, que je suis lourde, prolixe, emphatique, et que je n’ai aucune des conditions du journalisme. Ce que je fais maintenant au Monde n’irait point aux Débats, et, quant aux idées, n’y serait peut-être point admis.

Comment, mon ami, arriver dans un journal où vous écrivez et se risquer sur un terrain où vous régnez incontestablement ? Je n’irai jamais me poser en rival de qui que ce soit. J’ai trop d’indolence pour cela, et me poser en concurrence d’un souverain me

  1. Journal dirigé par l’abbé de Lamennais.