Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 2.djvu/310

Cette page a été validée par deux contributeurs.
307
CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

Qu’est-ce que cela signifie ? Depuis quand est-ce que j’impose quelque chose, parce que je ne veux pas me laisser imposer un travail inutile ou antipathique ? Je crois avoir assez fait pour l’obligeance et l’amitié en vous écrivant, en vous répétant que, quelque journal que vous fissiez (à moins qu’il ne fût juste-milieu ou carliste), je vous donnerais des articles ; mais j’ajoutais que je vous en donnerais plus ou moins, selon que vous suivriez une ligne plus ou moins rapprochée de la mienne. Est-ce là imposer quelque chose ? Et, quand je dis : « Si vous prenez un tel, je serai active et zélée, au lieu d’être complaisante et tolérante (je serai solidaire de votre tendance au lieu de me retirer de la solidarité), » vous m’écrivez par trois ou quatre fois (Fleury dans sa lettre d’hier, et toi dans celle d’aujourd’hui), que je vous impose un rédacteur ?

Je ne suis pas contente de cette façon d’être comprise, je te le dis franchement ; finasser ou dominer me sont également antipathiques, et je ne comprends pas que, désirant de moi, non une inspiration et une direction, mais une pure et simple collaboration d’amitié, et, étant sûrs de ce dernier point, qui paraissait vous convenir beaucoup mieux que mon dévouement pour l’être moral du journal et mon identification avec cette œuvre commune, vous veniez me dire aujourd’hui que, pour avoir ma participation complète, vous sacrifiez vos sympathies, votre confiance, et que vous vous laissez imposer quelqu’un que vous jugez sans lumières et sans capacité.