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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

c’est l’amour qui fait ces miracles. L’amour de l’âme, je le veux bien, car, de la crinière du philosophe, je n’ai jamais songé à toucher un cheveu et n’ai jamais eu plus de rapports avec elle qu’avec la barbe du Grand Turc.

Je vous dis cela pour que vous sentiez bien que c’est un acte de foi sérieux, le plus sérieux de ma vie, et non l’engouement équivoque d’une petite dame pour son médecin ou son confesseur. Il y a donc encore de la religion et de la foi en ce monde. Je le sens en mon cœur comme vous le sentez dans le vôtre.

Maintenant réfléchissez bien. Nous ne nous sommes parlé que ce soir. Les autres entrevues ont été consacrées à examiner les possibilités de l’affaire, et, si mes amis du Berry me confirment mes pouvoirs, il n’y a pas de difficultés matérielles à notre association.

Mais il y a les difficultés intellectuelles et morales qui peuvent naître de la doctrine, sans laquelle nous ne ferons rien d’utile et de bon ; il faut donc que nous soyons d’accord sur ce point que, vous et moi, nous ne fassions qu’une tête et qu’une conscience. Je n’ai pas d’amour-propre, je ne crois en aucune chose valoir et peser plus que vous. Je ne voudrais jamais rien exiger. Je voudrais seulement qu’à nous deux nous fissions la tierce juste et non la dissonante.

Devant l’excellent M. de Pompéry, je n’aurais pas osé vous parler du fond de ma croyance. Il discute trop, la discussion me fatigue, et je trouve que c’est