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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

l’administration salariée. Vous avez raison de le dire, c’est une honte. C’est renoncer lâchement à un des droits qui constituent la dignité humaine, c’est reculer devant un devoir social. Les conséquences pourraient en être graves pour le pouvoir, aussi bien que pour les classes dont le sentiment public n’a pas d’organe public. Soyez donc cet organe, n’hésitez pas. M. de Lamartine donne un noble exemple en contribuant de sa plume et de sa bourse au brillant succès du Bien public, de Macon. Ce journal de localité a déjà, dans l’opinion de la France, une plus grande valeur que la plupart des journaux de la capitale. Je ne doute pas que nous ne puissions obtenir de ce noble publiciste quelques articles pour notre Éclaireur, et j’ose compter sur le concours de quelques autres noms illustres et chers au pays. Les hommes de grand cœur et de grande intelligence sentiront tous que la vie politique et morale doit être réveillée et entretenue sur tous les points de la France. Nous avons dans notre province des éléments admirables pour seconder ce généreux projet. Il ne s’agit que de les réunir.

Littérairement, ce serait une œuvre intéressante à tenter. Paris a passé son niveau un peu froid, un peu maniéré sur toutes les âmes, sur tous les styles. Chaque province a pourtant son tour d’esprit, son caractère particulier ; cet effacement est regrettable. Ne serait-ce pas une sorte de rénovation littéraire que de voir tous ces éléments variés de l’intelligence française concourir, sous l’inspiration de l’idée commune