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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

idiome, que je me pique de connaître à fond. Je me serais bornée à la localité que j’habite, croyant, comme je le crois encore (pardonnez-moi cette prétention), que nous parlons ici le berrichon pur et le français le plus primitif. C’est la lecture attentive de Pantagruel, dont l’orthographe, d’ailleurs, est identiquement semblable à notre prononciation, qui m’a donné cette conviction, peut-être un peu téméraire. Le travail que vous avez fait est plus étendu, par conséquent meilleur, plus important et plus utile. Mais, en étendant votre récolte, vous avez perdu quelques richesses de détail. Ainsi vos verbes ne sont pas complets comme les nôtres, ou peut-être vous n’avez pas voulu compléter votre conjugaison du verbe manger. Nous avons le subjonctif que je mangisse ; première personne du pluriel que je mangissienge. Vous voyez que nous avons tous les temps, et que nous avons sujet d’être un peu pédants et de faire les puristes.

Cependant nous ne ferons pas comme fait l’Académie. Nous ne vous volerons rien, et nous ne vous contesterons rien, que l’orthographe et le sens exact de quelques mots. De plus, je me propose de vous envoyer une centaine de mots que vous examinerez, et dont quelques-uns certainement vous plairont, soit que vous fassiez plus tard un appendice à votre vocabulaire, soit que, comme amateur éclairé, il vous paraisse amusant de les connaître. Je suis en train de les bien examiner de mon côté, pour en établir l’orthographe ; car nos paysans ont une prononciation