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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND
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Quelquefois je vais me promener seule à cheval, à la brune. Je rentre sur le minuit. Mon manteau, mon chapeau d’écorce et le trot mélancolique de ma monture me font prendre dans l’obscurité pour un marchand forain ou pour un garçon de ferme. Un de mes grands amusements, c’est de voir le passage de la nuit au jour ; cela s’opère de mille manières différentes. Cette révolution, si uniforme en apparence, a tous les jours un caractère particulier.

Avez-vous eu le loisir d’observer cela ? Non ! Travaillez-vous ? Vous éclairez votre âme. Vous n’en êtes pas à végéter comme une plante. Allons, vivez et aimez-moi. Ne partez pas sans m’écrire. Que les vents vous soient favorables et les cieux sereins ! Tout prospère aux amants. Ce sont les enfants gâtés de la Providence. Ils jouissent de tout, tandis que leurs amis vont toujours s’inquiétant. Je vous avertis que je serai souvent en peine de vous si vous m’oubliez.

Je vous ferai arranger une belle chambre chez moi.

Je fais un nouveau volume à Lélia. Cela m’occupe plus que tout autre roman n’a encore fait. Lélia n’est pas moi. Je suis meilleure enfant que cela ; mais c’est mon idéal. C’est ainsi que je conçois ma muse, si toutefois je puis me permettre d’avoir une muse.

Adieu, adieu ! le jour se lève sans moi. — Per la scala del balcone, presto andiamo via di qua…