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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND
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CXI

À M. HIPPOLYTE CHATIRON, À PARIS


Venise, 16 mars 1834.


Mon ami,

Je te remercie de ta lettre. Ton souvenir, malgré tout, me fait toujours plaisir. J’ai tardé à te répondre, parce que je viens de faire une maladie assez grave. Je suis bien à présent, et, au moment de quitter l’Italie, je commence à m’y acclimater. J’y reviendrai ; car, après avoir goûté de ce pays-là, on se croit chassé du paradis quand on retourne en France. Voilà l’effet que cela me fera.

Je n’ai pas été charmée de la Toscane ; mais Venise est la plus belle chose qu’il y ait au monde. Toute cette architecture mauresque en marbre blanc au milieu de l’eau limpide et sous un ciel magnifique ; ce peuple si gai, si insouciant, si chantant, si spirituel ; ces gondoles, ces églises, ces galeries de tableaux ; toutes les femmes jolies ou élégantes ; la mer qui se brise à vos oreilles ; des clairs de lune comme il n’y en a nulle part ; des chœurs de gondoliers quelquefois très justes ; des sérénades sous toutes les fenêtres ; des cafés pleins de Turcs et d’Arméniens ; de beaux et vastes théâtres où chantent la Pasta et Don-