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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

corde. Il prend la corde, et sonne jusqu’à ce qu’on apporte un autre saladier. Dans la pièce, il y a un prince indien que ses ennemis poursuivent pour le tuer. Quand il est en prison, l’éléphant arrache les barreaux de la croisée, approche son dos et l’emporte. Une autre fois, on a mis le prince dans un coffre pour le jeter à la mer. L’éléphant ouvre le coffre avec sa trompe, et va cueillir des cerises qu’il lui apporte à manger. Il remet des lettres, il bat le tambour, il offre des bouquets aux dames, il se met à genoux, il se couche, il s’assied sur son derrière. Tout cela sans qu’on voie jamais le cornac. Il est tout seul en scène, il entre dans des cavernes, il sort par où il doit sortir, il ne se trompe jamais. Il n’y a pas de figurant qui fasse mieux son métier. Après la pièce, le public le redemande et on relève le rideau. Alors les deux éléphants, après s’être fait un peu attendre, comme font les actrices pour se faire désirer, arrivent tous les deux, saluent le public avec leur trompe, se mettent à genoux, puis s’en vont très applaudis et très satisfaits. Solange dit qu’ils sont bien gentils et bien mignons. Elle a été aussi voir les marionnettes chez Séraphin ; mais elle aime bien mieux les chevaux et les éléphants.

Adieu, mon petit amour. Quand tu seras à Paris, je te mènerai voir tout cela. Je te ferai des pantoufles. Je t’envoie des bonshommes qu’on m’a donnés pour toi. Adieu, mon enfant. Embrasse pour moi ton papa et Boucoiran. Solange vous embrasse tous trois,