Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 1.djvu/205

Cette page a été validée par deux contributeurs.
202
CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

patrie. C’est un bonheur de n’être pas blasé ou désabusé de ces biens-là. Apportez-moi des cailloux de votre sol, s’ils ont quelque chose de curieux. Si je ne l’ai pas rêvé, vous avez comme nous beaucoup de coquillages marins pétrifiés, des espèces qui nous manquent.

Maurice ne fait rien. Je ne suis pas assez rigide. Ce temps de dévergondage ne devant pas être long, je le laisse trotter avec Léontine, et les jours de travail sont rares. Le seul point, c’est qu’il n’oublie pas ce qu’il sait et non qu’il fasse des progrès sans vous. Je voudrais bien, mon enfant, que l’étude du latin ne fût pas aussi exclusive. Vous m’avez promis de commencer l’histoire à votre retour et de la faire marcher de front avec la géographie. Il me semble que ces études poussées un peu rapidement lui seraient fort utiles. Non pas qu’il faille espérer une grande mémoire des faits à son âge, mais c’est la seule manière d’ouvrir ses idées aux choses de la vie, aux lois, aux guerres, aux vicissitudes des mœurs, aux constitutions, à l’existence des peuples et à la marche de la civilisation. C’est d’un peu haut qu’il faudrait donc envisager cette science. Au lieu de le faire moisir, comme au temps de l’abbé Rollin, sur les petites guerres et les rois insignifiants d’une foule de petits États de l’antiquité, il faudrait résumer l’histoire universelle dans une sorte de cours à votre manière. Cette analyse générale n’est pas l’ouvrage d’un cuistre et vous trouverez à la dresser avantage et plaisir