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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

garrotterons le Gaulois pour l’empêcher d’y prendre part, nous ferons brailler Planet et nous nous amuserons des manies de chacun de nous, sans les froisser, sans en souffrir. Dans le jour, nous travaillerons, car il faut travailler ! Quand on ne s’est pas renfermé le matin comme nous disions l’autre fois au Coudray, on n’a pas de plaisir à se trouver libre le soir. Il faut s’imposer la gêne une moitié de sa vie pour s’amuser l’autre moitié. Vous vous créerez une occupation, ne fût-ce que de mettre en rapport Claire et Philippe, Jehan Cauvin et la cathédrale, Berido et la prima donna[1]. Nous louerons un piano et nous nous y remettrons tous les deux. Si vous ne vous trouvez pas bien de votre vie de garçon, il sera toujours temps de vous marier ; car, avec nous, liberté de rompre quand vous voudrez ; mais essayez-en d’abord ; après, vous verrez. Il y aura toujours des filles nubiles, c’est une espèce qui croît et multiplie par la grâce de Dieu.

Et puis, mon bon Charles, marié ou veuf ou garçon, que vous soyez Charlot ruminant dans sa chambrette sur les misères de l’étudiant, de l’artiste et du célibataire, ou bien M. le receveur au sein de son intéressante famille, que vous soyez libre de nous venir trouver ou que votre future épouse vous le défende, aimez-nous toujours, et, croyez-le, quand vous pourrez vous échapper, vous nous trouverez joyeux de vous

  1. Héroïnes de divers fragments littéraires inédits de George Sand.