Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 1.djvu/139

Cette page a été validée par deux contributeurs.
136
CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

nuer le prix de ce que vous faites pour moi. Ne dites pas que vous ne faites que remplir un engagement, tenir une promesse. Du moment que les nouveaux chagrins que j’ai éprouvés m’ont mise dans la nécessité de quitter Nohant une partie de l’année, vous étiez dégagé de tout lien. Vous pouviez me dire : « J’ai fait le sacrifice de mes intérêts et de toute mon ambition à l’espoir de vivre près d’une amie ; mais je ne me suis pas engagé à veiller sur ses enfants en son absence et à supporter l’ennui de la solitude pendant l’autre moitié de l’année. » Quand je vous ai offert un sort moins brillant, mais plus doux peut-être que celui dont vous jouissez actuellement, je ne prévoyais pas les circonstances où je me trouve aujourd’hui. Je me disais que mon amitié vous dédommagerait des avantages de la fortune, et je vous connaissais assez pour espérer que vous goûteriez le bonheur sans éclat que mon affection vous promettait. Maintenant que je me vois forcée de prendre un parti sévère et d’assurer mon repos, ma liberté, par une résidence de six mois par an à Paris, c’est en tremblant que je vous demande de me consacrer votre temps. Loin de revendiquer comme un droit la promesse que vous me fîtes, je vous en affranchis entièrement. Si c’est à l’honneur seul que je dois votre noble conduite à mon égard, je vous rends votre liberté, sans que, pour cela, vous perdiez mon estime.

Non, mon cher enfant, je ne veux rien devoir qu’à votre amitié. Je ne veux point me soustraire à la re-