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et surtout M. de La Fleur, qui parlait beaucoup de M. de Voltaire sans l’avoir jamais lu, et qui affectait un grand mépris pour les superstitions rustiques.

Quand Clopinet eut atteint au service du baron l’âge de quinze à seize ans, il se trouva avoir épuisé, en fait d’ornithologie, toute l’instruction qu’il pouvait recevoir dans le château et dans le voisinage, et il fut pris du désir invincible d’aller demander à la nature les secrets qu’on ne trouve pas toujours dans les livres. Il se sentait malade, et tout le monde remarquait sa pâleur. Il songea donc sérieusement à se rendre libre, et, bien qu’il fût très-content de son patron et qu’il lui fût attaché, il lui déclara sa résolution de faire un voyage, promettant de lui rapporter tout ce qu’il pourrait recueillir d’intéressant pour son musée. Le baron lui reprocha d’abandonner son service, l’instruction qu’il prétendait lui avoir donnée et le manque de reconnaissance pour ses bontés. Il lui offrit, pour le retenir, de porter ses appointements au même chiffre que ceux de La Fleur et même de ne plus le faire manger à l’office. Clopinet se trouvait bien assez payé et ne se sentait pas humilié de manger à l’office ; il remercia et refusa. — Peut-être, dit le baron, es-tu fâché de porter la livrée ? Je t’autorise à te faire faire un petit habillement noir comme celui de l’apothicaire. — Clopinet refusa encore, il ne se trouvait que trop richement habillé. Alors le baron se fâcha, le traita d’ingrat et de maniaque, le menaça de l’abandonner et lui déclara qu’il rayerait de son testament la petite rente qu’il y avait inscrite en sa faveur. Rien n’y fit. Clo-