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oncle Laquille, de révéler l’endroit précis du rivage où il avait passé l’été. Avec ses parents, il ne se départit point de cette réserve. Il savait que, s’il parlait des Vaches-Noires et de la grande falaise, personne chez lui ne lui permettrait de retourner vivre dans un endroit réputé si dangereux. Il laissa donc croire à ses parents qu’il arrivait de l’Écosse, — son oncle ayant prononcé devant lui le nom de ce pays-là, — et qu’il y avait fait bonne chasse.

Il se tira assez bien des nombreuses questions qu’on lui fit le premier jour. Comme on ne savait chez lui quoi que ce soit des pays étrangers, il n’eut point de longues histoires à inventer. Il répondit qu’en Écosse on mangeait du pain, des légumes et de la viande comme ailleurs, que les arbres ne poussaient pas la racine en l’air, enfin qu’il n’avait rien vu de merveilleux là ni ailleurs.

— C’est bien, c’est bien, lui dit le père à la fin du souper ; ce qui me plaît de toi, c’est que tu ne dis pas des mensonges et des folies comme ton oncle Laquille. Continue à être raisonnable, et tout ira bien, puisque tu as de l’invention pour rapporter des choses à vendre et pour faire le commerce. Je ne veux point te priver de ton argent, il est à toi, je vais le placer en bonne terre qui t’appartiendra ; ce sera le commencement de ta fortune.

— Si vous n’en voulez point pour vous, répondit Clopinet, j’aimerais mieux m’en servir pour reprendre mes voyages et faire d’autres trouvailles.

Ce que Laquille avait prévu arriva. Le père Doucy ne voulut pas comprendre ce que lui disait son fils.